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La gestion directe dans les réseaux de transports publics de voyageurs

Définition de la gestion directe

En matière de gestion des services publics, les collectivités territoriales et leurs groupements disposent d’une liberté de choix en application du principe de libre administration prévu à l’article 72 de la Constitution.

Appliqué au domaine du transport et de la mobilité, l’article 5 du règlement européen n°1370/2007 du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route (ROSP) prévoit explicitement cette liberté.

Ainsi, lorsqu’une collectivité décide d’exploiter elle-même un service public dont elle a la compétence, elle fait le choix de la gestion directe avec un opérateur interne et non celui de la gestion externalisée.

Les particularités de la gestion directe

  • Absence de mise en concurrence
    La collectivité qui souhaite confier l’exploitation d’un service public à un opérateur interne n’est pas soumise aux obligations de publicité et de mise en concurrence prévues par le code de la commande publique pour la conclusion des marchés publics et des délégations de service public (DSP).
  • Conclusion d’un contrat entre la collectivité et l’opérateur interne
    Dans le domaine du transport et de la mobilité, la collectivité attribue les services à l’opérateur interne par un contrat appelé « contrat d’obligations de service public ». Comme pour un marché public ou un contrat de DSP, celui-ci détermine les missions confiées à l’opérateur interne, ses objectifs et ses moyens, le contrôle et le suivi par l’autorité organisatrice ainsi que sa rémunération.
  • Souplesse contractuelle
    Le régime des modifications prévu par le code de la commande publique, et notamment le seuil des avenants limité à 10% ne s’applique pas aux contrats conclus avec les opérateurs internes. Le contrat peut ainsi évoluer pendant toute sa durée d’exécution sans limitation.

Les différentes formes de la gestion directe

Lors de la création de l’opérateur interne, la collectivité a le choix entre plusieurs formes de structure, avec chacune ses particularités :  

  • La Régie dotée de la seule autonomie financière (RAF)
    La RAF ne dispose pas de la personnalité morale et a une autonomie limitée, elle est un service intégré à la collectivité qui l’a créée, régie par le code général des collectivités territoriales. La RAF exerce ses activités pour le compte de sa collectivité de rattachement et elle peut intervenir pour des tiers, de manière accessoire.
  • La Régie créée sous la forme d’un établissement public industriel et commercial (EPIC) 
    La régie EPIC est dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière. En tant qu’établissement public, elle est régie par le code général des collectivités territoriales. La régie EPIC exerce ses activités pour le compte de sa collectivité de rattachement et elle peut intervenir pour des tiers, de manière accessoire.
  • La Société publique locale (SPL) 
    La SPL est une société anonyme régie par le code de commerce et par le code général des collectivités territoriales. Elle exerce ses activités exclusivement pour le compte de ses collectivités actionnaires et sur leur territoire. Il faut au minimum deux collectivités pour créer une SPL, cela peut par exemple être entre une région et une agglomération, deux agglomérations, une agglomération et sa ville centre, etc.

Les compétences confiées à un opérateur interne

Les missions de l’opérateur interne peuvent correspondre à l’ensemble des compétences exercées par les autorités organisatrices :

  • L’organisation de services publics de transport public : transports réguliers, transports à la demande, transports scolaires ;
  • L’organisation ou la contribution au développement d’autres services de mobilité : mobilités actives (vélos, marche à pied), mobilités solidaires, mobilités partagées (covoiturage, autopartage) ;
  • D’autres missions : le conseil et l’accompagnement, le transport de marchandises et la réduction de la congestion urbaine, la planification ainsi que la lutte contre le changement climatique et la pollution. 

Les opérateurs internes peuvent également se voir confier par des collectivités qui ne sont pas autorités organisatrices des missions complémentaires au transport public, telles que le stationnement ou encore le transport périscolaire.  

Il appartient donc à chaque collectivité de définir le périmètre d’action de son opérateur interne. Par exemple, un opérateur interne peut être compétent pour la gestion des services de transport public, du vélo et du stationnement.

Chiffres sur la gestion directe dans le secteur de la mobilité

La gestion directe est le choix le plus répandu pour la gestion des transports publics urbains au niveau international : Amérique (Etats-Unis, Canada), Asie, Afrique et Europe (Allemagne, Belgique, Italie, Espagne, etc.). 

En France, et à l’instar de ce que l’on peut constater dans le secteur de l’eau, il y a depuis quelques années une forte tendance à la « remunicipalisation » des services publics dans le domaine du transport et de la mobilité.

En effet, entre 2005 et 2023, hormis le cas particulier de la Région Ile-de-France, la part1 de la population desservie par un réseau urbain de transport opéré par un opérateur interne est passée de 11.6% à 27.5%, soit une augmentation de 137%.

Depuis 2005, ce sont 25 réseaux qui sont passés de la gestion déléguée à la gestion directe, dont récemment des grandes autorités organisatrices de la mobilité comme Avignon, Grenoble, Montpellier ou Strasbourg alors que dans ce laps de temps seuls 4 réseaux sont passés de la gestion directe à la gestion déléguée.

Sans compter les régies exploitant uniquement des services de transport scolaire, il existe en France 45 opérateurs internes de transport public urbain et 17 opérateurs internes de transport public non urbain, dont la liste est à consulter en annexe. Ces opérateurs internes sont répartis de la manière suivante :

14 Régies à simple autonomie financière (RAF) 

27 Etablissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC)

21 Sociétés publiques locales (SPL)

Pourquoi les élus choisissent-t-ils la gestion directe ?

Des différents retours d’expérience, AGIR Transport a constaté via des enquêtes réalisées auprès des élus que le choix de la gestion directe pouvait résulter de différentes motivations :

  • La maîtrise des coûts, grâce à une gestion transparente, sans actionnaires privés à rémunérer ni intérêts commerciaux à satisfaire.
  • Une volonté des autorités organisatrices de pouvoir s’appuyer sur un partenaire technique de confiance, complémentaire des services de la collectivité.
  • Faire le choix d’une entreprise publique locale, ancrée dans le territoire de manière durable, proche des usagers. 
  • La souplesse avec la possibilité de faire évoluer le réseau en fonction des projets sans être contraint par les règles prévues par le code de la commande publique, notamment le seuil des avenants limité à 10%.
  • Agir sur le manque de concurrence sur un territoire. La collectivité créé un opérateur interne pour challenger la réponse d’un ou plusieurs candidats lors du renouvellement d’un contrat de DSP et lui confie l’exploitation si elle juge que l’offre du ou des candidats n’est pas satisfaisante. 
  • Dans un souci de décentralisation et d’indépendance vis-à-vis de l’Etat, la volonté de ne pas contractualiser avec un Groupe de transport détenu majoritairement par l’Etat qui possède tout ou partie des actions des 3 grands groupes présents sur le territoire
    • Keolis : 70 % Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et 30 % Caisse de dépôt et placement du Québec 
    • RATP : 100% Etat français 
    • Transdev : 66% Caisse des Dépôts et 34% Groupe RETHMANN 

Quelles sont les phases de création d’un opérateur interne ?

La création d’un opérateur interne nécessite de respecter différentes étapes qui devront être adaptées selon le contexte local et le projet envisagé par la collectivité.  

Les principales étapes sont les suivantes :

  • Etude sur le choix du mode de gestion 
    Audit de la gestion existante du service public (audit du contrat, du personnel, du matériel, des données d’exploitation, commerciales ainsi que les données financières/comptables/fiscales) 
  • Préparation à la création de l’opérateur interne

    Rédaction des projets de statuts de l’opérateur interne et du futur contrat OSP.

    Préparation de la dotation initiale affectée à l’opérateur interne et destinée à permettre son fonctionnement opérationnel.
    Elaboration d’un business plan. 

  • Création de l’opérateur interne

    Délibération de la collectivité de rattachement actant du choix de la gestion directe et de la forme de l’opérateur interne

    Délibération de la collectivité de rattachement créant l’opérateur interne

Comment fonctionnent les réseaux exploités en gestion directe ?

Au même titre que les filiales d’un Groupe de transport, les opérateurs internes bénéficient d’expertises en interne leur permettant de gérer le réseau au quotidien.  

Par leur expertise « métier », les opérateurs internes ont la capacité de répondre à la volonté des autorités organisatrices et à l’ensemble des projets qu’elles pourraient leur confier comme la réalisation d’études comparatives, de benchmarks ou encore d’expérimentations préalables en matière de transition énergétique, de nouvelles mobilités, de système de MaaS, etc. 

En cas de besoin et de manière ponctuelle, les opérateurs internes peuvent s’appuyer sur l’expertise d’AGIR Transport et celle de bureaux d’études.

AGIR Transport et les opérateurs internes

AGIR Transport comporte dans son objet social la défense des principes de libre administration des collectivités territoriales et de libre choix du mode de gestion. En ce sens, l’Association ne privilégie pas un mode de gestion en particulier, le choix de la gestion directe ou déléguée résultant de chaque contexte local. 

Néanmoins, pour que cette liberté soit effective et que les élus, en cas de choix de la gestion directe, puissent véritablement être en mesure de créer un opérateur interne et de le faire vivre au quotidien, ils doivent pouvoir bénéficier d’une assistance technique.  

C’est la raison pour laquelle les élus ont créé AGIR Transport afin de constituer une expertise indépendante leur permettant d’accompagner et de conseiller les opérateurs adhérents sur toutes les questions en lien avec la gestion d’une entreprise. L’Association leur apporte un appui en matière juridique, technique, financière, fiscale, sociale, d’innovations et de nouvelles technologies, etc. 

Au-delà de l’expertise proposée, AGIR Transport anime un réseau professionnel d’échanges organisé en communautés professionnelles : directeurs, RH, marketing, exploitation, maintenance, qualité, sécurité, etc. Ce réseau dynamique permet aux opérateurs d’être connectés les uns avec les autres. 

Pour limiter l’« isolement économique », AGIR Transport a créé, en 2011, la Centrale d’Achat du Transport Public (CATP). Étant elle-même soumise au préalable aux procédures du code des marchés publics, la CATP permet à l’ensemble des acheteurs publics et notamment aux opérateurs internes de se dispenser des procédures de mise en concurrence pour leurs achats et de bénéficier ainsi de prix compétitifs en mutualisant les volumes.

Au-delà des besoins récurrents liés au renouvellement des matériels, la CATP accompagne également les collectivités de façon ponctuelle comme lors du démarrage de l’activité d’un opérateur interne en dotant la structure afin qu’elle puisse fonctionner. Ainsi, lors de création de SPL et de régies, la CATP a pu passer pour le compte de ces opérateurs des marchés d’assurances, de pièces détachées, de carburant, de logiciels, d’expertise comptable, de nettoyage, etc. 

Enfin, AGIR Transport représente les opérateurs internes au niveau national en s’inscrivant dans le débat public notamment quand les problématiques liées au mode de gestion sont abordées.  

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